AVEC33, au départ d’Arbis le 12 octobre 2019

Dès 9h30 nous voilà rassemblés devant l’église Saint-Martin d’ARBIS. En effet, le programme concocté par nos amis et passionnés Christian Goga et le couple Morin est chargé…

C’est une journée avec les visites de 5 églises avec en milieu de journée celle du château de Benauge qui nous attend!

Devant le portail de l’église nous remarquons des chapiteaux de pierre blanche. Côté nord : Caïn et Abel. Le patriarche Caïn est de face tordu par le remord. Il vient d’assassiner son frère Abel qui gît au sol. En arrière-plan s’élève la fumée du sacrifice qui avait été préparé pour Yahweh (un des noms antiques pour désigner le Très Haut). Chapiteau 2 : L’expulsion d’Adam et Ève du Paradis terrestre (ci contre). Au sud, chapiteau 1 : Le sacrifice d’Isaac par Abraham. Chapiteau 2 : La tentation d’Adam et Ève avec le serpent enroulé autour de l’arbre aux fruits défendus. A l’intérieur d’autres chapiteaux possèdent de beaux entrelacs, ainsi qu’une frise de palmettes ligaturées. Le style de leur sujets indique une date autour de 1150.

Sur le mur sud de la nef se trouvent les traces de plusieurs cadrans canoniaux. (Un cadran canonial est une espèce de cadran solaire utilisé du VIIe au XIVe siècle pour indiquer aux membres d’une communauté religieuse le début des actes liturgiques). A noter sur le vitrail de Saint-Martin un blason d’archevêque. Il s’agit du blason fantaisiste (fond de l’écu azur au lieu de de gueules “rouge”), de Alexandre Roullet de la Bouillerie archevêque coadjuteur du cardinal Donnet.

Nous nous rendons ensuite à l’église de LADAUX, consacrée elle aussi à saint Martin. Notre guide n’est autre que Jean Louis Mandrau, ancien maire de cette commune et très attaché à ce patrimoine (son grand père en avait scellé le chancel ). La paroisse de Ladaux est mentionnée pour la première fois dans les textes peu avant 1208. Au-dessus de la corniche il y a une seconde élévation et fortification réalisée vers la fin du XVIe siècle. À l’époque des Guerres de religion, surtout entre 1575 et 1590, l’église servait de refuge à la population. Monique Perrin nous indique que le saint Martin d’un vitrail est plutôt un saint Augustin. En effet, le saint porte un sacré cœur. Le portail est complété par des pilastres triangulaires, surmontés de clochetons. Cette église a accueillie récemment le 11ème Festival du luth. A remarquer dans le cimetière la tombe du chevalier Jean Jérôme de Lucmau de Classun, datée de 1847 et chargée de plusieurs représentations symboliques de la Mort et de la Résurrection. En repartant nous apercevons , face à la mairie, la fontaine sacrée de Saint-Clair.

C’est l’église de CANTOIS, consacrée à saint Seurin, qui fait l’objet de notre troisième visite. “La laide église”, c’est ainsi que la qualifiait Léo Drouyn . Pourquoi ?Cela est probablement dû a son portail décalé sur la gauche et encadré de deux massifs contreforts. Il y a aussi son clocher-mur en forme de anse de panier qui lui confère une forte originalité. Ce mur, à une seule baie campanaire dont la cloche, une des plus ancienne de Gironde, date de 1563 ! A noter une porte d’accès latérale surmontée d’un cadran canonial.

Nous prenons ensuite de la hauteur! Nous entrons en effet dans une formidable fortification! Celle du château de BENAUGE sur la commune d’Arbis. Nous y sommes accueillis par Mme et M. JOURNU les propriétaires. Madame Journu nous conduit dans les combles ou se trouve une vaste salle, à la charpente très particulière, car elle est incurvée épousant ainsi la courbure des murs sur lesquels elle repose. Quel beau travail !

A l’intérieur, notre guide nous conte, à l’aide de panneaux, le récit des propriétaires successifs, nous faisant voyager dans l’Histoire. La notoriété de cette forteresse historiographique est telle que Léo Drouyn lui a réservé un chapitre dans son célèbre ouvrage, La Guienne militaire (1865). Le château, qui est implanté sur une colline aux pentes assez raides, occupe une position qui le rendait aisément défendable. Dans la première moitié du XIIe s, la seigneurie était passée à la famille des Bouville-Gabarret. Petit aparté de Mme Journu : les troubadours Savary de Mauléon et Elie Rudel se sont disputés les faveurs de la comtesse de Gavarret-Bouville ; la marquise de Boursin fut surnommé pour cela la “mauvaise comtesse” .

En 1252, le roi d’Angleterre, duc d’Aquitaine, Henri III Plantagenet, assiège et prend le château et confisque les biens de Bernard de Bouville. En 1266, le château est donné par le duc à Jean III de Grailly, (captal de Buch ), pour services rendus. C’est à ce grand capitaine que la forteresse doit la construction d‘une première enceinte de pierre et de la basse cour attenante, après nivellement des anciens fossés du côté Est. Jean de Grailly participe aux meurtrières campagnes du Prince Noir; c’est à lui qu’on attribue la manœuvre qui, à Poitiers, permit la capture du roi de France, Jean le Bon. En 1453, Benauge se rend au roi de France, Charles VII, après un mois de siège, une victoire obtenue par l’utilisation des canons ayant servis lors de la bataille de Castillon de la même année. En 1462, Jean IV de Foix-Grailly fait hommage au roi de France, Louis XI. Ce Jean IV est le père de Gaston de Foix, Grand Sénéchal de Guyenne. En 1587, Marguerite de Foix-Candale épouse Jean-Louis Nogaret de La Valette, duc d’Épernon, le colonel général de l’infanterie d’Henri III, celui-si vendit la forteresse pour aller vivre en son château de Cadillac.

Nous visitons ensuite la chapelle. Elle est couverte d’une voûte sur croisée d’ogives et arcs doubleaux, reposant sur des chapiteaux à feuillages. Une très belle clef ornée d’un feuillage enserrant une tête sert de clef de voûte. La chapelle est éclairée par deux baies en arc brisé, la plus large comportant trois lancettes surmontées de trois quadrilobes, la seconde de deux lancettes surmontées d’un quadrilobe : les remplages de ces fenêtres, parfaitement lisibles de l’extérieur, sont de qualité. Par contre nous ne voyons cette voûte que depuis le rez de chaussée, en effet le sol carrelé de la chapelle étant effondré .

C’est ensuite sous une cave voûtée que nos hôtes nous reçoivent pour notre pique nique, certains choisissent le pré au dehors pour partager les victuailles, tout cela arrosé du vin de château Benauge de bonne facture. Nous nous acquittons des dix euros pour la visite et pour aider les propriétaires et l’association “Les amis du château” à poursuivre la colossale oeuvre de restauration.

. Ci contre carreaux anciens de la chapelle et dessin de la forteresse par Léo Drouyn.

Chapelle St Pierre de Monpezat

La chapelle Saint-Pierre de Montpezat, qui se trouve au lieu-dit la Cure, dans l’ouest de la commune de Mourens est un petit sanctuaire (15 mètres de long), d’une architecture fruste et sans programme ornemental. Cependant, elle fut un lieu de culte très fréquenté par le flot de pèlerins qui s’y rendaient pour les qualités curatives d’une veyrine. D’autre part, des sarcophages antiques affleurent le sol alentour et des fouilles du cimetière en 1888 ayant rendu des objets de bronze laissent penser que le site était un lieu de culte depuis une époque pré-chrétienne. (La veyrine ou verrine, était une croyance en une pratique thérapeutique pseudo-religieuse réalisée avec un orifice par lequel on pouvait faire passer une personne afin de la débarrasser de son mal , ou de l’extraire, avec une idée de renaissance.)

Et voici Saint-Martin de HAUX au portail somptueux! Imaginons ce portail à l ‘époque ! Entièrement peint ! Il devait être de loin encore plus magnifique ! Notre amie Evelyne Ballion (architecte-restauratrice et spécialiste des églises de l’Entre-deux-Mers) va démarrer la restauration de cette église. Au XVIIIe siècle un certain nombre de pièces, en partie en provenance des ruines de l’abbaye de La Sauve-Majeure, ont été incrustées dans les contreforts et la façade

De tous les portails historiés des églises romanes de la Gironde, celui de Saint-Martin de Haux est l’un des plus accomplis. Le programme figuré était très ambitieux (plus de 150 sujets différents rien que pour les voussures !). On trouve 4 voussures et un archivolte intermédiaire.Voussure I : Frise animalière, Voussure II : Les tireurs de corde, Voussure III : Les vingt-quatre vieillards de l’apocalypse, Voussure IV : On y voit 28 personnages se livrant à des occupations agricoles, parfois accompagnés d’animaux. Sur la clef de l’arc on trouve une représentation des quatre évangélistes (le Tétramorphe).

C’est Antoine Caillard, accompagné par Madame Anne Neel, qui nous guide tout d’abord à l’extérieur côté chevet La construction du chevet était antérieure à celle de la façade ouest et la facture est plus primitive. Les chapiteaux soutenant la corniche sont très rustiques à décor gravé. Les modillons de la corniche sont de qualité ordinaire, avec des simples représentations de figures géométriques, des animaux comme le cochon,un rapace, des hommes ithyphalliques et un tonnelet de vin, pour rappeler des péchés de chair. A l’intérieur les vitraux, très lumineux sont de facture moderne pour la plupart.Sur les chapiteaux intérieurs alternent personnages : femme tentatrice (luxuria-libido), animaux : serpents Chiens opposés, Sirènes-poissons et végétaux :feuillages divers. (Ci-contre photo Adoration des Mages.)

Deux églises dédiées à saint Martin lors de notre sortie, cela n’est pas surprenant c’est le saint que l’on retrouve le plus souvent dans les églises de Gironde. Mais qui était saint Martin ? Il a été le personnage abordé par notre fidèle et érudit conférencier Didier Coquillas à Saint-Médard d’Eyrans le 15 mars 2019.

Quand il meurt en 397, Martin, Évêque de Tours, est déjà le saint de la Gaule Romaine. Martin naît à Sabaria (Hongrie actuelle) en 316 de parents païens. Son père, de simple soldat, est devenu tribun, c’est-à-dire général. A l’âge de 10 ans, Martin entre dans une église, s’intéresse à la foi et commence son catéchuménat. Il songe même à aller vivre dans le désert. Le général, son père, ne l’entend pas de cette oreille et met en application un édit sur l’enrôlement des fils de vétérans. Il fait arrêter son fils par la garde qui le conduit à l’armée. Martin fait donc son service dans la cavalerie, puis passe à la garde de l’empereur. En garnison à Amiens par un hiver de grand gel, il rencontre, à la porte de la ville, un pauvre mourant de froid. N’ayant plus d’argent à lui donner, saisissant l’arme qu’il portait à la ceinture, il partage sa chlamyde (nom militaire de sa cape) en deux, en donne un morceau au pauvre et se rhabille avec le reste. Évêque de Tours ermite dans le Poitou, Martin obtient de quitter l’armée (il y servait depuis 25 ans). Il est accompagné par son biographe Sulpice Sévère.

Il crée une communauté de disciples, l’abbaye à Ligugé, et va visiter les malades et les pauvres Homme de prière, il exerce la compassion et guérit les malades, tantôt par de simples remèdes, tantôt par l’huile des malades, et, parfois, par des guérisons miraculeuses ! Évêque, Martin n’en demeure pas moins moine : il monte une cellule de l’autre côté de la Loire, entre le fleuve et le coteau de Marmoutiers . A sa mort sa notoriété est déjà immense.

Posted in